domingo, 20 de julio de 2008

Contemplation

Devant s’étend la mer. Brillante de tout son argent, frissonnante sous sa fine couche de brume, calme et sereine, elle s’étend jusqu’au bout du monde. La douce ligne horizontale qui semble être sa clôture – pour nous qui la voyons à taille d’homme – est un abîme pour le regard et la pensée. Elle fut le flot qui mit en colère et rasséréna Hugo, elle fut l’obsession d’Hemingway et l’excitation de Colomb. Et elle est aujourd’hui encore cette source inépuisable d’inspiration, ce flux captivant et étourdissant, ce doux va-et-vient qui apaise les âmes. Derrière la grande verrière de ce petit pub de village, un homme la regarde. Il écrit. Il écrit ce qu’il voit, il écrit ce qu’il vit. Il écrit sans penser à rien. Les mots coulent dans sa plume comme les flots s’évadent entre les mailles des filets. Rien ne retient ses mots, il n’est pas de mesure, pas de limite à son expression. Et la mer est là ; elle se laisse regarder, elle se laisse caresser par les yeux et par les mots de l’homme. Elle aussi elle le regarde mais son regard est si profond qu’il ne lui parvient pas. Au loin, sur la terre, les yeux de tous les océans observent les hommes. Celui-ci est un homme simple ; il la regarde avec le regard émerveillé des contemplateurs. Ce n’est pas le regard révérenciel des défenseurs de la nature, ni celui amoureux des marins, ce n’est pas non plus le regard brillant des premiers explorateurs. C’est ce regard rêveur qui voit sans voir, ces yeux qui regardent trop fixement et finissent par ne plus voir mais imaginer. Les images alors se superposent, affluent, sans but, sans raisonnement, sans pourquoi. Et le mouvement lancinant de la mer est comme une force jaillissante, une muse éternelle et régulière qui alimente la rêverie des hommes. Et les vagues qui agitent la pensée n’ont ni début ni fin, ni naissance ni mort, elles traversent les siècles et font naître dans l’esprit des hommes l’art de leur temps. La mer enfante l’esprit puis reçoit de lui les louanges de sa fécondité dans une boucle universelle qui unit l’homme à la nature, l’humain à l’univers.
Il a deux grands yeux bleus délavés par le sel et les larmes. Et au-dessus de ses grands yeux usés d’horizon, une casquette bleue marine, d’où s’échappent quelques boucles blanches, jette son ombre jusqu’à mi-front. Il a le poil du visage hirsute et les lèvres immobiles. Le silence l’entoure. Quelques fois, le silence dans sa tête est rompu par les murmures de la mer et le craquement d’un mât. Dans son nez il respire l’iode, ce parfum qu’aucun parfum de femme ne peut remplacer…

01/05

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