domingo, 14 de diciembre de 2008

Quand je mourrai

À Ramón González Sánchez

Quand je mourrai, laissez-moi au bord du chemin.

Abandonnez-moi aux fleurs, au musc et au jasmin,
que la terre imprègne sur moi son odeur
que les arbres fassent un toit, les oiseaux un chœur ;
chantent les montagnes, retentissent les vallées,
aujourd’hui je meurs ! Viens ruisseau, viens m’embrasser !
Et vous, pierres du sentier qui dans la lune
vous reconnaissez, écrivez sur la dune
que je m’oppose, que je m’esquive au trépas,
pour que d’en haut Il voie que je ne monte pas ;
que je reste ici, mort mais accroché à la terre,
que je reste avec la faux pour éviter le cimeterre.
Ensevelissez-moi, brindilles et poussière,
que votre sève coule sur ma misère
et que du balcon du ciel m’observent les anges
et fassent pleuvoir une pluie de mésanges.
Le vent m’emportera, et l’oubli et le temps
qui sont comme des remèdes pour les vivants.
Comme avant de naître on ne connait pas encore,
mort, on m’aura oublié avant l’aurore.
Mais de grâce ne m’enfermez pas pour toujours
entre des planches d’où je ne pourrai voir le jour ;
ne mettez pas votre tristesse en prison
car c’est du cœur le pire de tous les poisons
de mettre en bière ce que le ciel vit naître
et de cacher à l’homme ce qui cesse d’être.
Vous qui aujourd’hui n’êtes plus libres de m’aimer
donnez-moi ce petit morceau de liberté
de n’être point par le rituel social
mis dans un lit de bois comme dans un bocal.
Je sais, les vivants décident et ce qui est doit être
mais j’aimerais tellement reposer sous un hêtre
plutôt que de pourrir entre quatre planches,
comme un souvenir froid dans un cœur étanche.
La vie n’est qu’un délai entre deux portes
l’une ouvre l’œil, l’autre brise de sa main forte
la clepsydre qui, entre deux ouvertures,
nous livre au monde, aux sens, à la nature.

Dimanche 30 novembre 2008, à 04.00h